Cataracte chez le lapin 

 

Esther van Praag, Ph.D.

 

 

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Le mot cataracte vient du latin « cataracta » ou du grec « katarraktēs », qui signifie chute d’eau. Ceci se réfère à l’opacification croissante l’opacité du cristallin oculaire, qui se compare à « regarder à travers une chute d’eau ».  Une quantité de lumière passant à travers la lentille est diminuée. L’aptitude à focaliser les objets et l’acuité oculaire diminuent avec le temps. Ceci est accompagné par une diminution de la sensibilité aux contrastes. La capacité de voir les objets lorsque la lumière est intense est également réduite, et il n’est pas rare d’observer un lapin souffrant de cataracte de se cogner aux objets qui se trouvent sur son passage.

MediRabbit

Œil sain, avec une lentille oculaire qui laisse passer la lumière vers l’intérieur de l’œil (flèche)

Sandy Minshull

Lentille oculaire devenue opaque ou cataracte

Les changements observés au niveau du cristallin sont liés au métabolisme de l’oxygène et au recyclage de la molécule protectrice, le glutathionne. Comme la lentille est isolée de la circulation sanguine, la concentration d’oxygène y est basse, la deuxième plus basse dans le corps après le système nerveux et le cortex adrénal. L’énergie nécessaire au bon fonctionnement des cellules du cristallin est fournie par la respiration oxydative des mitochondries sous forme d’ATP. Ceci est accompagné par la formation de radicaux libres et autres molécules oxydatives. L’oxydation de la protéine glutathionne permet de réduire les radicaux libres et ainsi de neutraliser leurs effets toxiques. Le glutathionne oxydé va migrer vers la surface du cristallin, où il sera réduit par l’enzyme glutathionne réductase, avec l’aide d’une coenzyme dérivé de la vitamine B3. Ce cycle permet de régénérer le glutathionne. La vitamine C joue aussi un rôle protecteur et sa concentration à l’intérieur du cristallin est environ 40 fois plus élevée que dans le sang. Une fois que la vitamine C est à l’intérieur des cellules, elle va également réduire les radicaux libres et autres molécules oxydées.

Les cataractes observées chez les animaux et les humains peuvent être classifiées en trois catégories :

·         Cataracte nucléaire: caractérisé par la dégénérescence de protéines au centre du cristallin (nucleus), due à l’âge.  Elle est liée à  une élévation de la concentration de glutathionne oxydé (dangereux) dans la lentille. Il est également possible que le mouvement de ces molécules soit ralenti, due à l’âge et à un déséquilibre entre l’oxydation des protéines et des lipides. La lentille devient blanche et parfois brune.

Akira Yamanouchi

Lentille oculaire devenue opaque ou cataracte

Akira Yamanouchi

Cataracte mature brune

§  Cataracte corticale: caractérisé par la rupture périphérique du cristallin, avec progression vers le centre. Ce type est caractérisé par une diminution du niveau de glutathionne, accompagné par une destruction excessive de protéines, de lésions des fibres cellulaires de la membrane ou un déséquilibre de l’homéostasie du calcium (niveau maintenu de façon relativement stable au sein du corps).

§  Cataracte postérieure subcapsulaire: caractérisé par le développement de masses de cellules à l’arrière du cristallin. Plusieurs masses peuvent se développer, indépendamment les unes des autres. Ce type de cataracte est rare et est typiquement induit par le stress (par exemple, les rayons UV) ou à des médicaments (corticostéroïdes).

Chez les lapins, il existe en plus un quatrième type de cataracte, dû au parasite protozoaire Encephalitozoon cuniculi, avec rupture du cristallin.

Christine Goodhand

Lapin souffrant d’une cataracte causée par E. cuniculi

Dr Magdalena Stasiowska

Uvéite phacoclastique chez un lapin

Causes

L’apparition de la cataracte est généralement liée à l’âge. D’autres facteurs contribuant à son apparition sont l’hérédité, la nourriture, les médicaments, l’exposition à la lumière, la présence du parasite E. cuniculi, un traumatisme crânien ou une nourriture déficiente en caroténoïdes. L’incidence et les causes de la cataracte chez la lapine ne sont pas bien connues. Au contraire des autres animaux, le développement de la cataracte n’est pas lié au diabète, une maladie métabolique observée seulement chez les lapins obèses.

Susan L.

Effet d’un flash sur l’œil d’un lapin sain (au fond) et un lapin souffrant de cataracte (devant, lapin noir)

 Une augmentation des radicaux libres, une dégradation des mécanismes de protection ou une diminution de la quantité de glutathionne entraine une augmentation de la concentration de peroxyde d’hydrogène au sein de l’humeur aqueuse de l’œil. Même si le glutathionne peut réduire le peroxyde, le cycle producteur d’énergie sera détruit, permettant la diffusion de sodium dans la lentille. L’osmolalité (tendance naturelle à maintenir l’équilibre de l’eau) entraîne un œdème (accumulation d’eau) du cristallin. Les protéines à l’intérieur de cette dernière s’oxydent, deviennent opaques et insolubles (processus similaires à celui de l’ovalbumine et autres protéines de l’œuf lors de la cuisson).

Les radicaux libres attaquent les lipides présents dans la membrane, ce qui provoque une contraction du cristallin. Ces changements de pression au sein du cristallin cassent les fibres de la membrane et l’espace se remplit d’eau et de déchets.

Diagnose

Un diagnostic complet permet de diagnostiquer la cataracte et de surveiller son développement avec le temps. Rarement, une rupture du cristallin est observée.

Traitement

Le traitement de choix de la cataracte est la suppression du cristallin par voie chirurgicale, en utilisant la technique de fragmentation par ultrason, sans remplacement du cristallin. En effet, la régénération de cette dernière a été observée chez de nombreux lapins. Si tel n’est pas le cas, le lapin peut néanmoins discerner la lumière et différencier les objets.

Lisa Hutcheon

La cataracte peut être unilatérale...

Christine Goodhand

ou bilatérale...

Au cas où la cataracte est causée par le parasite E. cuniculi, le traitement inclue l’administration de fenbendazole (20 mg/kg, q 24 h.) pendant 28 jours. Un traitement plus long peut causer l’apparition d’effets secondaires, comme une dépression de la moelle osseuse. L’administration d’albendazole n’est pas recommandée, car des morts subites on été observés chez des lapins sains peu après de ce médicament (communication privée, Prof. P. Deplazes, Faculté de Médecine Vétérinaire, Université de Zurich, Suisse)

Si une uvéite est présente et si la lentille ne peut pas être extraite par voie chirurgicale, l’utilisation d’analgésiques locaux NSAID ou non-NSAID (par exemple, prednisolone acétate 1%) est nécessaire.

 

Amy Carpenter

Utilisation accidentelle de peroxyde dans l’oeil d’un lapin cottontail...

Lorsque le lapin souffre de douleurs, l’administration d’analgésique est recommandée. Si le traitement n’apporte pas d’amélioration, une intervention chirurgicale ou une énucléation peut aider le lapin. 

Melanie Kuenzel

L’abcès causé par E. cuniculi sur l’iris et la lentille a été enlevé chirurgicalement et l’œil a été bien guéri.

Remerciements

Un grand merci à Amy Carpenter (USA), Susan L. (USA), à Lisa Hutcheon (USA), à Christine Goodhand, à Melanie Kuenzel et Heather Bechtel (USA), à Sandy Minshull (Canada) et à Akira Yamanouchi (Veterinary Exotic Information Network) pour la permissions d’utiliser leurs photos.

Information supplémentaire

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