Est-ce que Encephalitozoon cuniculi, un parasite protozoaire

du système nerveux, peut être traité

avec la pyrimethamine ?

 

Esther van Praag, Ph.D.

 

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Renee Brennan

Vidéo de Rudy, un lapin présentant des signes d’une infection par E. cuniculi: torticolis sévère et involontaire, mouvements rythmiques des yeux horizontaux.

Rudy aujourd’hui, après un traitement de 28 jours avec le fenbendazole. Le torticolis et les secousses des globes oculaires (nystagmus) ont complètement disparus, et il ne souffre plus de crises d «épilepsie» depuis.  

Plusieurs études montrent que jusqu’à 80% de la population lapine saine est infectée par le parasite protozoaire Encephalitozoon cuniculi, sans montrer de signes cliniques et sans développer la maladie. La biologie et le cycle de vie d’E. cuniculi sont peu connus et son mode de transmission reste un mystère. La voie principale de transmission semble directe: de la mère à ses petits, plutôt qu’indirect: par les excréments et l’urine. Il est aussi possible qu’un lapin soit contaminé plus tard dans sa vie par un compagnon ou par des excréments contaminés, quoiqu’il existe divers exemple où des lapins positifs vivent avec un lapin E. cuniculi négatif durant de nombreuses années.

Le parasite attaque le système nerveux et les organes principaux, causant une variété de symptômes tels que le torticolis, une insuffisance hépatique, une insuffisance rénale, de l’incontinence, des uvéites phacoclastiques, cataractes et paralysie des membres inférieurs ou supérieurs (uni- ou bilatéral), un nystagmus (secousses des globes oculaires), et/ou d’autres symptômes neurologiques. Le lapin meurt souvent d’une meningoencephalitis.

La présence de Microsporidae parasites chez les mammifères entraîne des carences en micro-éléments et en vitamines, ce qui peut résulter en anémie. Aucune information précise n’est disponible au sujet d’E. cuniculi.

Traitement habituel: Benzimidazoles

Heather Mc Murray

Sweetie, un lapin âgé de 10 ans, diagnostiqué avec un titre élevé pour E. cuniculi, et premier lapin à avoir essayé le traitement par la pyrimethamine avec succès.

Le traitement actuel contre E. cuniculi utilise divers benzimidazoles. Alors que ces médicaments ont été utilisés avec succès chez les lapins, ils peuvent entraîner une élévation moyenne à élevée des enzymes hépatiques dans le sang. 

L’action des benzimidazoles est lente et dépend plus de la présence continuelle du produit dans le système digestif et le sang que de la concentration.

Les benzimidazoles se lient à la tubuline du parasite et la bloque. L’assemblage de ces tubulines dimériques forment les microtubules, qui jouent un rôle fonctionnel et structural important chez le parasite (transport de molécules nutritives, division cellulaire). Les benzimidazoles bloquent également certaines voies métaboliques du parasite, tel que le transport de glucose, sans affecter l’hôte (lapin, chat, chien). Les différents benzimidazole utilisé dans le traitement d’E. cuniculi sont les suivants:

 L’albendazole est dégradé dans le foie en produits plus hydrophiles, ce qui diminue sa capacité à traverser la barrière sang-cerveau; l’efficacité des produits de dégradation contre E. cuniculi n’est, quant à elle, pas connue. L’utilisation d’albendazole, un produit non-licencié pour utilisation chez le lapin, a entraîné la mort soudaine de lapins sains ou l’apparition d’insuffisance de la moelle des os, quoique cette dernière n’a pas été testée cliniquement.

En général, on observe que l’albendazole est moins efficace que l’oxibendazole.

L’oxibendazole est une molécule plutôt lipophile qui n’est pas dégradée par le corps. Les avantages de l’oxibendazole sont que cette molécule passe à travers la barrière sang-cerveau ou dans le système nerveux central, qu’elle ne possède pas de propriétés tératogènes chez le lapin et qu’elle n’est pas dégradée dans le foie, au contraire de l’albendazole. On ne sait par contre pas si l’oxibendazole agit efficacement contre E. cuniculi, et quels sont les effets secondaires après une utilisation prolongée de ce produit.

Le fenbendazole a été étudié pour ses effets préventifs et de guérison chez les lapins affectés par E. cuniculi et les résultats ont été publiés dans un journal scientifique (Veterinary Record, 2001, pp.478-480). Ceci fut une grande percée car ce fut la première étude scientifique qui prouvât l’efficacité du fenbendazole, premier médicament qui semble guérir (et non simplement contrôler) cette maladie. On a démontré par ailleurs que le fenbendazole traverse la barrière sang-cerveau chez les souris. Dans de rares cas, l’utilisation prolongée du fenbendazole a entraîné une insuffisance de la moelle des os, des problèmes digestifs et de l’anorexie, quoique ceci n’a pas été étudié cliniquement.

Les lapins de laboratoire ont montré un titre élevé pour E. cuniculi un an après avoir été traités avec le fenbendazole et sont restés asymptomatiques après le traitement. Ces lapins, euthanasiés un an après le traitement avec le fenbendazole, possédaient pourtant encore le parasite dans leur cerveau.

 

REMARQUE:

Le fenbendazole reste le traitement de choix contre E. cuniculi.

Les lapins utilisées dans l’expérience avec E. cuniculi ont gardé un titre élevé un an après avoir été traité avec le fenbendazole, mais sont resté cliniquement asymptomatique. Lors d’autopsies, la présence du parasite dans le tissu cérébral a été observée. Ces lapins étaient néanmoins totalement asymptomatiques.

Dernièrement, de plus en plus de lapins traités avec un ou plusieurs benzimidazoles montrent des rechutes une fois que le traitement est arrêté. Des personnes possédant des lapins traités à long-terme avec de l’oxibendazole, ont signalé que le traitement a graduellement perdu de son efficacité, comme si le parasite avait développé une résistance à ce médicament. Ou s’agirait-il de deux parasites infectant le même lapin: comme E. cuniculi et la toxoplasmose ?

Utilisation de la pyrimethamine ?

En se basant sur la littérature scientifique et l’expérience de vétérinaires, d’autres médicaments ont été employés chez des lapins – cas désespérés où l’euthanasie a été considérée. Les produits utilisés incluent la lufénurone, la pyrimethamine (utilisé dans le traitement de la toxoplasmose chez le lapin) ou le ponazuril combiné au fenbendazole (respectivement 5 jours et 28 jours), et ont donnée plus ou moins succès.

Le protocole de traitement pour E. cuniculi a été développé en se basant sur ceux contre Sarcocystis sp. ou Toxoplasma sp. chez le cheval ou le chat, respectivement, utilisant le médicament antiprotozoal pyrimethamine (Daraprim), associée avec des antibiotiques sulfa et des anti-inflammatoires non-stéroidaux.

Le traitement dure un mois  chez le cheval et deux semaines chez le chat. Les effets secondaires sont rares.

Malgré le fait qu’une étude antérieure a montré que la pyrimethamine est ineffective contre E. cuniculi aux concentrations de 5 et 20 mg/ml, celle de 50 mg/ml montrât une inhibition de la croissance de l’ordre de 35%. Des études in-vitro préliminaires récentes ont montré que le développement de spores d’E. cuniculi est totalement stoppé en présence de doses thérapeutiques (1mg/kg) de pyrimethamine.

Chez le lapin, la pyrimethamine a jusqu’à maintenant été employé pour traiter la toxoplasmose, Pneumocystis carinii, la coccidiose hépatique, etc. Il a été montré que le médicament est sans danger pour le lapin, lorsque le bon dosage est employé. Le médicament anti-protozoaire attaque directement le parasite, où il bloque le métabolisme de l’acide folique du parasite et de l’antibiotique trimethoprim-sulfa accroît l’effet de la pyrimethamine contre le parasite.

Ce traitement se base sur le protocole utilisé chez le chat, pour traiter la toxoplasmose:

        Pyrimethamine (1 mg/kg) tous les jours,

        Acide folique: 3 to 5 mg deux fois par semaine jusqu’à quotidien,

        Pyriméthamine: 0.5 mg/kg deux fois par jour,

        Sulfadiazine (médicament sulfa à longue action, peut être remplacé par la trimethoprim-sulfa): 30 mg/kg deux fois par jour.

REMARQUE:

Le dosage de l’acide folique semble élevé, pourtant il correspond à celui utilisé dans le traitement de la toxoplasmose chez le chat.

L’acide folique peut être remplacé par la thiamine. L’acide folinique est le meilleur, mais coûte cher. L’utilisation de trimethoprim est contra indiquée. En effet, cet antibiotique semble intensifier l’effet toxique de la pyrimethamine

Le traitement dure au minimum un mois, deux semble apporter un meilleur résultat, mais il faut s’assurer qu’il n’y a pas d’effets secondaires. En effet, l’administration simultanée de pyrimethamine-sulfadiazine peut affecter le fonctionnement de la moelle des os, une anémie ou leucopénie (diminution du nombre de globules blancs) peut être observée. L’effet est rarement grave; il est néanmoins recommandé de suivre le lapin et de faire des contrôles sanguins à intervalles réguliers. L’administration d’acide folique permet de diminuer les effets secondaires du traitement.

Le lapin doit recevoir l’antibiotique sulfa et la pyrimethamine de façon quotidienne. En effet, l’apparition d’une résistance à la pyrimethamine a été observée chez Sarcocystis sp. lorsque la pyrimethamine fut administrée en absence de l’antibiotique sulfa.

Les lapins ont été traité sous la supervision des Drs Mark Lennox et Joanne Hach, DVM.

Sweetie est un lapin âgé d’environ 10 ans, avec un titre élevé et une paralysie totale de son seul membre inférieur. Il restait couché toute la journée et été dépressif. Après quelques jours, il a essayé de se lever,  de se tenir debout, malgré son membre inférieur raidit. Sa dépression est passée et il montrât beaucoup d’intérêt à son compagnon-lapin. Sweetie a montré une amélioration immense de sa qualité de vie et de sa mobilité.

Le même effet positif a été observé chez Starsky et Sidney, un lapin âgé de 4 ans et demi, qui possède un titre élevé pour E. cuniculi et souffre de paralysie des membres inférieurs. Après 18 jours de traitement, il peut se déplacer à nouveau, et tente même de sauter par le côté haut dans son bac à chat

 

Sharon McGovern

Sidney, ayant un titre élevé positif pour le parasite E. cuniculi, souffre de paralysie des membres inférieurs avant le début du traitement avec la pyrimethamine.

Sharon McGovern

18 jours après le début du traitement, Sydney tente de sauter dans son bac à chat

Remerciement

Un grand merci à Heather McMurray (USA) et à Sharon McGovern (USA) pour l’envoi de photos de leurs lapins durant le traitement avec la pyrimethamine et pour leurs feedback réguliers, ainsi qu’à Sue Chang pour essayer le nouveau traitement chez leurs lapins.  Un grand merci aussi à Renee Brennan pour la vidéo de son lapin Rudy.

Merci également au Prof. P. Deplazes (VetSuisse, Université de Zurich, Suisse) pour le temps qu’il a pris pour partager ses connaissances au sujet d’E. cuniculi.

Merci également à aux lapins Sweetie, Sidney et son compagnon pour leur patience durant les sessions de photos.

Information supplémentaire

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